Le décalage - 07 Janvier 2025

 

Cela fait longtemps que je voulais écrire sur ce sujet tant il est conséquent chez moi et m'aura accompagné toute ma vie. C'est ce qui m'a façonné, mis à distance des autres, confirmé une confiance en soi déjà mise à mal.

Mais qu'est-ce que ce décalage ? C'est ce ressenti de n'être à sa place nulle part et avec personne ou presque. C'est le sentiment d'être une extraterrestre, un humain pas comme les autres, foncièrement différent. Et par conséquent, quand on n'en connait pas la raison, cette différence est intégrée comme étant inférieure aux autres.

Durant plusieurs décennies, c'est ce décalage que j'ai trainé à la patte. Je n'avais pas les mêmes discussions, les mêmes envies, les mêmes façons de voir les choses, les mêmes centres d'intérêts, la même curiosité, etc... On évolue dans un monde que nous ne comprenons pas mais nous nous sentons également incompris, nous n'adhérons pas aux discussions qui nous semblent banales et qui ne nous enrichissent pas. J'ai souvent pensé que je n'étais pas une femme normale, je ne me reconnaissais pas dans les fréquentations féminines que j'avais et leurs conversations ne m'animaient pas. Je m'ennuyais terriblement et ne comprenait pas pourquoi je n'arrivais pas à être comme elles. Je me disais que je manquais surement de maturité, que j'étais une éternelle adolescente, hermétique aux discussions d'adultes. On a beaucoup de mal à s'intégrer dans un environnement social, professionnel, amoureux ou amical dans ces conditions. Les "Small Talks", c'est à dire ces petits propos sur la météo, la dernière recette de la quiche lorraine ou les problèmes de circulation en ville nous sont indifférents et nous avons du mal à y trouver un quelconque bénéfice. 

Ces situations nous poussent à porter un masque, à singer un bref intérêt mais elles nous obligent surtout à une suradaptation éreintante. Rentrer coute que coute dans ce moule de la normalité, pour ne pas se faire remarquer et pouvoir être intégré dans un milieu social quel qu'il soit. Cela implique un effort colossal qui peut même arriver à nous confondre entre notre véritable personnalité et cette pâle copie. On y perd son identité profonde.

Bien sur, je ne suis pas la seule à ressentir cela, mais lorsqu'on n'en connait pas la raison, c'est une difficulté supplémentaire à supporter et pas des moindres. On finit souvent seul, entouré de 2 à 3 relations amicales au maximum.

C'est au cours d'une consultation pour des soucis récurrents d'insomnies, que mon médecin généraliste me lâche cette bombe :

" Tu es HP,  j'en suis sûr et tes "soucis" viennent de là"

Je ne me suis pas satisfaite de cet annonce, et suis allée procéder à mes propres recherches par le biais de beaucoup de lectures sur le sujet, de vidéos mais il me fallait également le faire confirmer par un neuropsychologue spécialisé dans ce domaine. En aucun cas, je ne voulais me bercer d'illusions et tenait à en être certaine. j'écrirais un autre article sur le sujet. Mais le fait de savoir permet de comprendre cette notion de décalage. Et même si cela ne résout rien, car le décalage ne s'efface pas à l'annonce de cette découverte, cela permet de mieux composer avec lui. Pour ma part, la culpabilité et mon sentiment d'infériorité n'a pas disparu mais s'est atténué : ce n'était plus "à cause de " mais "grâce à" et ça change beaucoup d'éléments.

Je ne subissais plus cette probable immaturité, ce sentiment d'infériorité tenace mais simplement une différence, ce qui permettait de davantage composer avec, plutôt que de tout faire pour la rejeter.

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